S'embarquer dans l'Histoire.
Lorsque le 6 juin 1944 les Alliés débarquent en Normandie,
pas loin de là un voiler de pêche tout neuf termine ses
installations, le " Pod Hervé ", futur "Karrek
Ven ". Son moteur lui a été livré dix mois
plus tôt en gare de Douarnenez d'où un camion l'a emporté
à Port-Rhu. Deux chars à bancs (carrioles à cheval)
portaient les accessoires.
Le 15 mars 1945, ce bateau appareille enfin pour sa première
campagne de pêche.
Au maquereau, au thon et à la sardine, il en mènera cinquante,
de trois à quatre mois chacune.
Après un semi-abandon, ce sont, à partir de 1980, des
adolescents qui le prendront en charge, pour des expéditions
à travers le monde. Europe, Moyen-Orient, Afrique, Atlantique,
Amériques regarderont croiser, voiles déployées,
ce témoin d'un autre âge.
L'équipage qui, dorénavant, posera son sac à bord
du Karrek Ven prendra donc pied dans une histoire commencée il
y a plus d'un demi-siècle. Restaurer la mémoire.
Les premiers éléments recueillis de l'histoire ancienne
du bateau sont des commentaires et photos du fils de son dernier patron
de pêche, Marcel le Bihan.
Vinrent ensuite d'autres photos et les croquis d'aménagement
de Maurice Drévillon, patron à bord durant cinq ans, informations
et documents transmis par son fils Jean-Pierre.
Enfin, Jean-Louis Jacquin, fils d'Eugène Jacquin, voilier co-armateur
du Karrek Ven lors de son exploitation à la pêche, a entrepris
une étude des archives concernant ce bateau (factures, lettres,
documents administratifs), qui restituent ses années de construction,
celles de son exploitation à la pêche, et montrent le climat
politico-économique ayant présidé aux campagnes
de pêche de l'après-guerre et au déclin de ce type
de pêche artisanale.
Nous adjoindrons bientôt à ce site ces documents de valeur.
Ces informations, croquis, photos, permettront plus tard, avec le Journal
de la Restauration, la réalisation d'une publication bien documentée
sur ce bateau.
En bref.
Profitant d'abord d'un boum d'après guerre pour la pêche
artisanale, le Karrek Ven réalisait des campagnes de pêche
fructueuses, aux mains de patrons-pêcheurs consciencieux.
Mais la motorisation et les nouvelles réglementations favorisant
la pêche industrielle le condamnent finalement à mort,
comme la majorité de ces bateaux.
Il y échappa grâce à deux propriétaires successifs
désireux de l'utiliser pour le tourisme, qui le sauvegardèrent.
Ils ne s'en serviront pas et il sera racheté par un groupe d'amis
anglais et français passionnés de vieux gréements
qui le destineront à la formation des jeunes.
Bénéficiant alors d'un courant de société
où l'on s'intéresse aux méthodes pédagogiques
responsabilisant les jeunes adolescents, en même temps que d'un
engouement nouveau des Français pour les choses de la mer, il
mène, partiellement restauré, une série d'expéditions
au long cours.
Et puis, comme pour le temps de pêche, après le boum, badaboum...
Les inquiétudes sécuritaires et professionnelles actuelles,
les réglementations concernant les jeunes devenues très
restrictives, l'usure du bateau aussi, auraient dû le conduire
cette fois à sa fin définitive.
Cependant, beaucoup des jeunes qui avaient passé parfois plusieurs
années à son bord, ne l'entendaient pas de cette oreille.
Ils avaient grandi avec Karrek Ven, Karrek Ven devait continuer à
vivre et travailler. Ils provoquèrent et financèrent en
partie sa restauration, totale cette fois, pour lui permettre de démarrer
une nouvelle existence.
Alors, aujourd'hui, porté par un courant de pensée visant
à préserver l'environnement et la diversité sociale
des groupes humains, le voilier rénové s'apprête
à reprendre ses courses sur le globe.
A son bord, responsables de sa route et de sa maintenance, ce seront
de jeunes adultes, désireux de s'abstraire un moment du tourbillon
de la vie moderne pour se lancer dans cette découverte lente,
sensible, de la planète.
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Un programme de restauration optimiste.
Optimistes, nous l'avons étés plusieurs fois... Mais
comme toujours dans ce type d'aventure, les faits imposent leur rythme
qui bousculent nos prévisions !
Cependant, à présent nous percevons clairement la route
qui reste à faire car les deux tiers de cette restauration sont
à présent derrière.
La structure du bateau devrait être terminée mi-juillet
(galvaniser puis fixer les boulons de quille, changer l'allonge de voûte
et l'étrave, et terminer d'y poser les varangues et membrures
déjà taillées).
Parer l'ensemble des membrures, rectifier la râblure, et le bordage
peut commencer. Tous s'accordent à prévoir deux mois pour
le faire.
Les premières rangées de planches du bas (virures) posées,
le lest de béton sera coulé, tandis que commencera le
bordage des hauts.
Durant le bordage, un travail se ferait sur le pont : réfection
de celui-ci, et du bastingage.
Un plancher sera posé à l'intérieur, et les réservoirs,
conduites, électricité, seront installés. Cela
aussi peut se faire en parallèle au bordage.
Ainsi, Karrek Ven pourrait retrouver la mer vers octobre-novembre. On
avait espéré plus tôt, mais une crise du bois et
l'insuffisance de charpentiers qualifiés l'a empêché.
Les finitions et installations intérieures se feraient alors
dans quelques baies tranquilles de la région, pouvant durer 2
à 3 mois suivant l'effectif au travail.
Redisons, pour cette dernière phase, notre souhait d'y voir travailler
de futurs participants, cette entreprise ne fonctionnant que par leur
concours.
Rappelons que les participants aux expéditions peuvent mettre
à profit le délai jusqu'à leur arrivée à
bord pour s'occuper du financement de leur séjour.
Ils peuvent aussi aider l'association dans ses démarches pour
trouver des fonds.
La première expédition débutera en mer Caraïbe.
Nous avions d'abord envisagé des séjours de 2 ans, mer/terre.
Depuis, des discussions avec des jeunes nous ont conduits à accepter
l'idée de séjours d'un an seulement pour ceux qui le souhaitent.
C'est plus difficile à organiser et augmente la consommation
pure de ces services (tant qu'on ne sait pas comment faire les choses,
on est surtout un consommateur). Mais pour le lancement au moins, peut-être
faut-il envisager les choses ainsi, avec une augmentation de la cote-part
des participants à une année pour compenser consommation
de matériel et manque de savoir-faire.
Les suggestions à cet égard seront accueillies favorablement.
Pour mener a terme la restauration, des hommes, de l'argent.
Quelques stagiaires s'annoncent pour l'été. Peut-être
pourront-ils réaliser le pont, l'un d'entre eux terminant une
formation de bois et charpenterie de marine.
Nous espérons l'aide d'anciens de Karrek pour lancer le bordage
et les installations intérieures (mécanique, électricité,
eau).
Le financement devient préoccupant.
Il faut nous aider.
Directement, ou bien en trouvant des donateurs, des mécènes,
ou des associations ayant cessé leurs activités et pouvant
reverser le solde positif de leurs comptes sur celui de la SamKV (La
Société des Amis et Marins du Karrek Ven).
On n'aide généralement pas une telle entreprise pour une
raison objective, mais par sympathie. Le bateau plaît, la reconstruction
de son histoire et sa restauration intéressent, on se sent en
sympathie avec ceux qui s'en chargent, on aime le projet d'utilisation
future du bateau... Alors, on a envie de faire quelque chose.
Karrek en a besoin. Chaque jour nous interrogeons, anxieux, Internet,
pour savoir s'il y a des dons... L'argent qui arrive est converti en
monnaie locale et entièrement consacré au bateau, comme
le montre le graphique hebdomadaire du Journal.
Mais les dons s'essoufflent avec le temps, alors que les frais augmentent.
Comme pour un arbre, les branches se multiplient au fur et à
mesure que l'on y grimpe. Pour finir plus vite, éviter que le
bois posé ne s'abîme en traînant et pour réduire
les frais de séjour en chantier, nous menons plusieurs opérations
en parallèle à bord. Il y a donc davantage de matériaux
à acheter chaque semaine, et plus de salaires à payer.
Aidons le Karrek !
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